Tu connais l’histoire de ma vie Lecteur ? En réalité tu en connais des bribes et des facettes.Par ce billet je vais te donner la version originelle : L’histoire de ma vie, l’histoire au singulier parce que quand quelque chose se répète en boucle, on lui préfère le singulier. Le ménage, la vaisselle… Comme c’est quelque chose qu’on fait régulièrement alors c’est comme s’il n’y en avait plus qu’un.
Bah pour ma vie c’est pareil !
J’ai pas forcément envie de savoir d’où ça vient, mais le schéma est toujours le même : je fais confiance, je me fais confiance, et puis à cause de moi, à cause d’une erreur ou d’un faux pas, d’un côté de caractère qui bloque tout en moi, d’un coup je sabote.
Qu’est-ce que j’ai pu saboter, je suis une professionnelle pour ça.
Mais le pouvoir m’échappe tu vois, c’est comme si j’avais acquis les bases mais que d’un coup c’est quelque chose qui est devenu tellement puissant que je ne le maîtrise plus, le pouvoir m’échappe… Je ne sais pas.
Quoi qu’il en soit, à chaque fois que quelque chose devient beau dans ma vie, il y a un truc en moi qui met un point d’honneur à l’éradiquer dans les plus brefs délais.
Généralement cette extraordinaire propension ne s’applique qu’à mes relations avec les autres. Je n’abime pas les objets, je ne rate pas ma nourriture, je ne me saborde pas dans ma carrière professionnelle (quoi que…).
Tu sais Lecteur, j’ai pas appris à vivre avec les autres moi, j’ai appris à vivre toute seule. Seule avec une mère qu’il ne fallait pas que je dérange, parce qu’elle était malheureuse, fallait pas que j’en rajoute, et je m’appliquais, généralement j’ai plutôt bien réussi. « Tu étais l’enfant consolant » m’a-t-elle dit.
Cool.
Qui c’est qui me console moi ?
Bref…
Je ne suis pas méchante, franchement. Pour que je le devienne il faut vraiment me chercher, et à ce moment-là je peux, j’ai cette capacité, là je trouve les mots, ceux qui blessent, ceux qui font mouche. C’est très rare, j’essaye de plus en plus de l’éviter.
Non, la plupart du temps c’est en moi, c’est sur moi, autour de moi. C’est tout à fait égocentré et cet égocentrisme me permet la plupart du temps d’arriver à maîtriser les situations qui m’échappent, d’arriver à me protéger lorsqu’il y a des choses que je ne comprends pas, de me permettre de me recentrer parce que les gens ne me ressemblent pas…
Les gens ne me ressemblent pas, je ne ressemblent pas aux gens. J’ai jamais pensé que j’étais pareille, je me suis toujours sentie différente, ça a été difficile de l’accepter parfois car finalement j’ai toujours été différente. J’en ai fait une force, j’ai retourné la peau, sauf que sous la peau c’est la chair vive…
J’ai donc appris à composer, tant bien que mal, mais mes semblables ont toujours été une énigme pour moi, un espèce de challenge quotidien : que faire, comment se comporter ?
J’essaye d’apprendre, je me suis concrètement souvent cassé la gueule, j’ai souvent cru des choses, j’ai souvent été à côté de la plaque, j’ai donc souvent eu mal. Et toujours je me disais que si je ne l’avais pas cherché, je ne serais pas tombée et je ne serais pas en train de souffrir. T’es masochiste, pourquoi tu y retournes ? Pourquoi tu recherches ce qui te fait souffrir ?
J’en suis toujours là dans mes relations avec les autres.
Pourquoi chercher à se rapprocher ?
J’en suis incapable c’est certain.
Je ne conviens pas aux gens et les gens ne me conviennent pas.
Pourquoi s’acharner ?
Tu ne peux pas demander à un manchot de faire du tricot ben c’est pareil.
Je ne suis pas douée de ce qu’il faut je crois.
Au fil du temps, au fil des échecs, des dégringolades et des cassages de gueule je me suis créée ma carapace qui est vachement bien. C’est la carapace de la fille forte, indépendante, solitaire assumée, célibattante, qui vit des choses passionnantes, qui est arrivée à ce qu’elle voulait, avec sa bonne étoile, de la chance et de la persévérance. La carapace de la fille qui a une grande gueule et qui dit les choses parce qu’elle n’en a rien à foutre parce que de toute façon elle se fout de tout car elle se suffit à elle même.
Sympa ma carapace.
Et puis un jour y’a quelqu’un qui s’approche pour gratter, et sans même que tu te rendes comptes, cette personne a gratté assez profond pour voir en dessous. Tu le sais pas encore toi, tu ne vois que les signes, trouve des trucs bizarre, tu te dit que c’est curieux quelqu’un qui te comprend… Malgré toutes vos différences.
T’as deux solutions : soit tu remets ta carapace illico-presto, parce que putain en dessous t’es quand même à poil, soit tu te dis tant pis, tu te laisses aller, tu te dis que pour une fois ce ne serait pas une si mauvaise idée que ça que quelqu’un te connaisse.
Eh ben non, c’est carrément pas une bonne idée.
Ce n’est certainement pas une idée pour moi, avec ma carapace et ma capacité en sabotage, parce que tu vas tout faire pour que ça foire, malgré toi. Même si tu réfléchis et que tu fais gaffe et que tu essayes d’être dans le bien et le bon. Même si y’a plein de trucs que tu vas laisser passer parce que tu travailles sur toi et que tu mûris, et que tu fais preuve de compassion, de compréhension et de lâcher-prise, à un moment y’a ce truc qui va se déclencher et foutra tout en l’air en une fraction de seconde que tu n’auras même pas vu venir.
Consécutivement, et de la façon la plus naturelle du monde, tu vas décevoir les gens, tu vas mettre un froid et creuser l’écart.
Tu vas te foutre une carapace blindée pour les éloigner de toi. Même s’ils n’ont rien fait et qu’ils ne comprennent plus.
Quand tu y repenses après tout est trop tard, tout est fini.
Allez en prison, ne touchez pas 20 000 euros, ne passez pas par la case départ, ou bien restez-y… Pour toujours !